[Le Monde] En Lorraine, la transition à marche forcée des usines Stellantis vers l’électrique

L’interdiction des moteurs thermiques représente un défi industriel autant que social.

Trémery, Metz (Moselle) -envoyé spécial – L’électrique, le thermique… Deux mondes automobiles qui se côtoient dans un contraste parfois saisissant. Il suffit d’arpenter la vénérable usine Stellantis de boîte de vitesses, à Metz, (53 ans d’âge) pour le percevoir. D’un côté, les immenses ateliers qui crachent leurs vieilles boîtes manuelles au rythme de 3 500 par jour, dans un vacarme incessant, une odeur prenante, des sols noirs, des plafonds noirs hérissés de tuyaux noirs. De l’autre, un espace clair, repeint en blanc de haut en bas, des machines moins bruyantes, des robots porteurs ou visseurs à toutes les étapes de la fabrication et, à la sortie, des boîtes automatiques pour voitures électrifiées. Mercredi 29 juin, Stellantis a permis à un panel de journalistes et d’analystes financiers de toucher du doigt la réalité de cette transition du vieux au nouveau monde automobile, dans ses usines lorraines. Et à un moment pas totalement choisi au hasard. L’événement a eu lieu quelques heures après l’approbation par les vingt-sept Etats membres de l’Union européenne du projet d’interdiction de la vente de voitures à moteur thermique, à partir de 2035. Une décision qui  « ne surprend pas et ne choque pas » le directeur général du groupe franco-italo-américain, Carlos Tavares. « C’est un choix politique et non industriel,  a relevé le patron présent à Metz, mercredi . Nous nous y attendions. Maintenant, il n’est plus l’heure de négocier, mais de s’organiser pour faire face. Ils décident, nous exécutons. » (…)

Mais il reste un problème majeur : un moteur électrique est constitué de trois fois moins de pièces qu’un moteur thermique, et l’ensemble des actuels salariés du thermique n’aura pas une place dans le monde électrique. A Tremery et à Metz, Emotors et eTransmissions ont planifié un effectif total de 1 200 personnes en 2024 (700 + 500), alors que les deux usines emploient aujourd’hui 3 470 personnes (2 370 +1 100) et que les effectifs ont déjà fondu par rapport aux 4 400 salariés de 2019. A Douvrin, un accord signé par trois syndicats (FO, CFTC, CFE-CGC) prévoit une reconversion du personnel de l’usine de moteurs vers la gigafactory d’ACC, mais il ne concerne que 400 personnes sur 1 500 salariés selon la CGT. 

FO, premier syndicat de Stellantis en France, a affiché son inquiétude en demandant, le 29 juin, au gouvernement un « sommet de l’auto » pour trouver des remèdes à la  « casse sociale inédite »  que provoquera la fin du moteur thermique.  « Ça peut bien se passer à Trémery, si les volumes sont làdit Olivier Lefebvre, délégué syndical central FO chez Stellantis. Mais il y a beaucoup d’inconnues : pour Metz, pour Douvrin, pour les usines terminales qui assemblent les véhicules et pour tous les fournisseurs. Sans compter que cette multiplication de coentreprises va compliquer la négociation collective. » En somme, pour les salariés, des perspectives plus noires que claires.

Source : Le Monde

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